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Il fait rire les enfants et rêver les parents : le lac Titicaca

Après la grosse bêtise de Quentin la veille au moment de quitter Cusco, nous n'avons pas traîné trop longtemps dans les parages et avons foncé jusqu'à Andahuaylillas, une petite ville distante de 45 km abritant une magnifique église surnommée "la chapelle Sixtine des Andes", la tête pleine des merveilles découvertes dans la Vallée Sacrée des incas, et notamment du Machu Picchu.


Après les splendeurs construites par les mains des Hommes, nous avons rendez-vous avec une création grandiose de la nature : le plus haut lac navigable du monde. Vous avez deviné ? C'est le lac Titicaca.


Marquant la frontière entre le Pérou et la Bolivie, ce lac de 8 562 km² abritant une quarantaines d'îles est situé à quelques 3 800 m au-dessus du niveau de la mer, ce qui ne l'empêche pas de connaitre les marées : celles-ci peuvent avoir une amplitude de 80 cm !

 

Berceau de la culture inca, ce lac est bercé de légendes. À commencer par l'origine de son nom, qui fait tant ricaner les écoliers.


Selon certains, ce nom issu de l'aymara serait une déformation de Titi Khar'ka, "roc du puma", ou de titiyaya, "puma de pierre", ou "puma gris".


En effet, selon la légende, les humaient vivaient en paix dans une vallée fertile, ne manquant de rien et ne connaissant ni l'ambition ni la haine, ni la maladie ni la mort, entourés par les montagnes et à l'abri de toute influence néfaste, protégés de tout par les apus (dieux des montagnes)... à la seule condition de ne jamais au grand jamais tenter d'en atteindre le sommet.


Mais le diable défia les humains d'aller récupérer le Feu Sacré sur les montagnes, afin de rompre l'ordre établi et l'équilibre de la Terre - évidemment les Hommes se laissèrent influencer et suivirent les recommandation du diable.


Pour se venger de cette trahison, les apus firent sortir des montagnes des hordes de pumas mangeurs d'humains. Ce fut un véritable carnage.


Inti, dieu du Soleil, voyant tous les Hommes périr, se mit à pleurer, pleurer, pleurer… pendant quarante jours et quarante nuits. Tant et si bien que se forma un lac magnifique, où les terribles pumas se noyèrent et se transformèrent en statues de pierre. (Toute ressemblance entre cette légende inca et le déluge de la Genèse serait tout à fait fortuite...)


Selon une autre légende, Viracocha, le dieu créateur (ou Inti, le dieu soleil, selon d'autres versions) fit jaillir des profondeurs du lac Titicaca son fils Ayar Manco. Il lui confia Tapac Yauri, un bâton d'or, qui s'enfoncerait sans effort dans le sol là où Aymar Manco devrait fonder Cusco, nombril du monde d'où il dirigerait l'Empire du Soleil. Ayar Manco partit donc avec Mama Ocllo, sa sœur et épouse, jetant son bâton sur le sol régulièrement.


Arrivés à un endroit, la baguette s'enfonça doucement dans le sol. Ayar Manco prit alors le nom de Manco Capac et devint le premier empereur inca. Il apporta la civilisation aux hommes, et après lui, ses fils se succédèrent sur le trône.


Notons que le dieu Tunupa, créateur des tiwanakus (la civilisation ayant précédé les incas), serait aussi né des eaux du Titicaca. Décidément, ce lac est la source de tout pour les civilisations andines, quelles qu'elles soient !


Une dernière légende pour la route ? Celle-ci est très étroitement liée à l'histoire du pays, et est tellement crédible qu'elle a déclenché passions, frénésies et recherches jusqu'à nos jours...


Atawallpa (ou Atahualpa : comme souvent, plusieurs orthographes sont acceptées), fils de l'empereur Huayna Capac, s'empare du trône de l'Empire du Soleil à Cusco suite à la guerre qui l'opposait à son demi-frère Huascar Capac, couronné avant lui, à peu près au moment où les conquistadors espagnols arrivent au Pérou.


La situation étant encore très instable (Huascar essaie de regagner le pouvoir qui lui a été arraché), le conquistador Francisco Pizarro invite Atahualpa à le rencontrer dans la ville de Cajamarca, lui proposant son aide dans la guerre fratricide qu'il mène.


Méfiant, Atahualpa accepte l'entrevue à condition que personne ne soit armé.


Le 16 novembre 1532, il entre dans la ville en grande pompe : sur sa litière d'or, le Fils du Soleil se présente devant l'espagnol escorté par plus de 30 000 hommes et femmes issus de l'élite de l'empire, tous sans armes, comme convenu.


Un prêtre ayant présenté une Bible au Sapa Inca en lui disant qu'elle était la "parole du Dieu unique", celui-ci porte la Bible à son oreille pour entendre cette fameuse parole. N'entend rien, il la jette par terre.


Les espagnols sautent sur le prétexte de sacrilège pour mener à bien leur plan : des hommes armés étaient cachés dans les maisons autour de la place ; ils sortent et lancent l'attaque.


Les espagnols ont accroché des grelots aux sabots de leurs chevaux (animal inconnu des incas jusqu'à l'arrivée des européens) et tirent dans tous les sens. Les incas paniquent totalement, d'autant qu'ils ne peuvent fuir par les ruelles trop étroites qui entourent la place.


Dans la pagaille, un grand nombre est piétiné, et les autres sont massacrés. On compte plus de 20 000 cadavres, et Atahualpa est fait prisonnier.


Francisco Pizarro lui promet la vie sauve et la liberté en échange d'une rançon invraisemblable : suffisamment d'or et d'argent pour remplir la pièce dans laquelle il est gardé prisonnier, soit 32 m² sur 2m de hauteur.


L'Inca ordonne que la rançon soit versée.


Pour les incas, l'or et l'argent n'ont pas de valeur intrinsèque. Les sujets affluent donc pour verser la rançon de leur empereur, vident les temples... Au total, 12 tonnes d'or et d'argent sont réunies.


Pendant ce temps, Huascar a également été fait prisonnier, et chacun demande aux espagnols l’exécution de l'autre. Prenant peur face à la puissance et à l'influence immense qu'Atahualpa semble exercer sur son peuple, Pizarro décide malgré tout de le faire exécuter.


Atahualpa est tué dans sa cellule le 29 août 1533.


C'est ici que commence la légende...


Certains affirment que l'exécution a eu lieu après le versement de la rançon. Mais selon d'autres, la rançon avait alors bien été réunie, mais était alors en cours d'acheminement vers Cajamarca par le lac Titicaca.


Apprenant l'exécution du Fils du Soleil, les incas fous de rage auraient alors jeté par-dessus bord leur précieuse cargaison, qui dormirait depuis au fond du lac...


Bien entendu, la perspective de pêcher 12 tonnes d'or et d'argent a attisé bien des convoitises... De nombreuses expéditions furent organisées, mais en vain : celle du Commandant Cousteau (et oui ! même lui !) ne parvint à mettre au jour que des poteries... Et une nouvelle espèce de grenouille... tricolore ! Notons tout de même qu'il découvrit des fausses de plus de 500 m de profondeur au fond du lac.


En revanche, une nouvelle légende est née : lors de l'expédition Atahualpa 2000, on découvrit une sorte d'Atlantide andine : les restes d'un immense temple englouti long de 250 m et large de 50 m, ainsi qu'un mur de 700 m de long !


En réalité, il s'agit des vestiges d'ouvrages de la civilisation Tiwanaku (on vous parlera beaucoup d'eux dans le prochain post) datant du XI ème ou XII ème siècle, qui auraient été engloutis lors d'un cataclysme ayant provoqué une brusque montée des eaux du Titicaca - et le déclin de la civilisation Tiwanaku.


On pourrait voir ici l'origine de la croyance, dans la cosmovision andine, dans le fait c'est du Titicaca que sont sorties les premières civilisations.


Il existe encore une autre théorie, selon laquelle ces pierres sculptées auraient été transportées sur le lac Titicaca afin de bâtir la cité de Tiwanaku, et se trouveraient au fond du lac en raison du naufrage d'embarcations les transportant - mais c'est quand même vachement moins rigolo.

 

L'une des principales "attractions" du lac Titicaca est la visite des îles Uros, aussi appelées "îles flottantes" : composées d'amas de tortora (une sorte de jonc) amarrés entre eux, elles ont été créées par les indiens uros au XIIIème siècle, elles sont aujourd'hui habitées par les aymaras (la dernière véritable indienne uros est décédée en en 1959).


Mais de nos jours, elles sont devenues une étape quasi obligatoire pour les touristes, et de nombreux voyageurs nous ont dit avoir été déçus par leur expérience, ayant eu l'impression de se retrouver dans une sorte de Disneyland andin, où il ont assisté à des cérémonies parfaitement chorégraphiées pour plaire aux touristes...


En effet, les touristes n'ont pas la possibilité de débarquer sur les îles effectivement habitées, et sont cantonnées à des îles-témoins.


Bof.


Nous décidons donc d'éviter ce passage et préférons nous diriger vers la plus sauvage et authentique péninsule de Capachica.


La plupart des habitant du coin vit de la pêche, de l'élevage de truites et de l'agriculture.


Ici, loin des sentiers battus touristiques, nous avons l'impression d'être vraiment au bout du monde.


Nous passons la fin d'après-midi à profiter de la sérénité des lieux, et y passons la nuit.


Le 26 juillet, nous allons faire un tour au "centre" de la péninsule de Capachica, le village de Llachon.


Ce tout petit village desservi par quelques bus locaux abrite quelques maisons, une église... et le point de départ d'une jolie petite balade vers un mirador avec vue imprenable sur le lac, avec une petite enceinte de pierres à l'arrivée (un lieu de culte à la Pachamama).




De retour au village, nous discutons un moment avecdes habitants, amusés de nous voir voyager en Kombi et accompagnés d'un chaton, et quittons momentanément le lac Titicaca pour un autre, (bien) plus petit, mais tout aussi joli : le lac Umayo.


Pourquoi ?


Tout simplement parce que sur ces rives se trouve un vase site funéraire préinca : les chullpas de Silustani.


Les chullpas sont des tours funéraires (celles de Sillustani mesurent jusqu'à 12 m de haut !) où étaient conservés les restes d'individus, sous forme de momies déposées en position fœtale.


Chaque chullpa abritait en général plus d'un individu - on compte jusqu'à 10 personnes par tour, probablement les membres d'une même famille, bien que les archéologues n'aient aucune certitude à ce sujet, d'autant que les chullpas ont été très largement pillées, rendant leur interprétation plus difficile.


Il est probable, mais pas certain, que les chullpas étaient réservées aux plus hauts dignitaires des civilisations ayant occupé les environs de la nécropole.


Ce qui est certain, c'est que les chullpas de Sillustani, les mieux conservées d'Amérique du Sud, ont été bâties dans un premier temps par la culture pukara (en 800 avant J.-C.), puis, à partir du XIII ème siècle, par les collas, une tribu aymara qui fut ensuite conquise au XV ème siècle par les incas, qui eux-même conservèrent cette tradition jusqu'à leur extermination par les espagnols.


Si les chullpas sont ici toutes de forme circulaire, possédant une unique ouverture orientée vers l'est (afin que l'âme des défunts renaisse chaque jour avec le lever du soleil), elles sont construites différemment en fonction de l'époque à laquelle elles ont été bâties : les plus anciennes sont composées d'un mélange de terre, de chaux et de pierre brute, tandis que les plus récentes sont uniquement faites de pierres parallélépipèdes parfaitement ajustées. (Si vous avez suivi, cela rappelle beaucoup les constructions incas de la Vallée Sacrée, notamment Sacsayhuman).


Nous passons bien deux heures à profiter de la vue et à nous coller "discrètement" à différents groupes afin de glaner des informations.


Il nous faut ensuite reprendre le route : nous allons jusqu'à Juli, la dernière "grande ville" péruvienne près du lac.


Nous nous arrêtons sur la place, car elle est très animée : il y a un concert de pop chrétienne, c'est assez marrant, tout le monde danse et chante...


Nous en profitons pour aller manger des brochettes vendues par les mamitas, et rencontrons un type sévèrement éméché mais fan de la France, avec qui nous rigolons un moment, avant d'aller nous trouver un coin plus calme, au bord du lac, pour passer la nuit.


Le lendemain, nous faisons nos adieux au Pérou : direction Desaguaderro, pour passer en Bolivie !



À bientôt en la carretera !



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